Éditorial: Comprendre la méta

Un terme incontournable lorsque plonge dans l’univers des jeux vidéo ou jeux de société compétitifs est celui de méta-jeu. Le méta-jeu, c’est le « jeu à l’extérieur du jeu » : l’ensemble des facteurs, des stratégies et des décisions qui se prennent en dehors du cadre d’une partie elle-même, mais qui auront une influence sur celle-ci.

Un exemple simple : si une certaine stratégie est populaire chez les adeptes d’un jeu vidéo en ligne, certains habitués choisirons l’équipement ou le personnage (selon le jeu) qui peut le plus efficacement combattre cette stratégie. Cette décision fait partie du méta-jeu car elle se prend avant le début de la partie. Afin d’exceller à de nombreux jeux vidéo ou jeux de société compétitifs, évaluer correctement « la méta » et effectuer les bons choix est primordial avant le début d’une compétition, d’un tournoi ou d’une ligue.

On peut s’amuser à extrapoler le concept de méta à d’autres environnements. La méta, en littérature de genre, c’est l’ensemble de tout ce qui s’écrit et se publie durant une période donnée. Les livres ne proviennent pas du néant : les auteurs et les éditeurs s’influencent, s’inspirent des mêmes événements ou réalités.

Pour pouvoir parler d’une méta, il faut cependant avoir une masse critique de participants. Oui, techniquement, si vous jouez tous les samedis à Diplomacy avec Georges et Roberta, vous formez une méta de trois personnes. En connaissant les habitudes de jeu de vos deux adversaires (surtout Georges, qui ne respecte jamais les pactes qu’il propose), vous avez de meilleures chances de remporter la victoire. Mais une méta devient intéressante à analyser lorsqu’elle est constituée d’une population plutôt que d’individus.

Il existe, dans la littérature de genre internationale, des courants et des mouvements clairs. Elle constitue une méta, pourrait-on dire. Mais je me questionne à savoir si le milieu de la SFFQ a atteint ces dernières années une taille suffisante pour constituer une méta digne de ce nom. Il y a une quinzaine d’années, j’aurais sans hésiter affirmer que non. Le nombre de parutions étaient suffisamment restreint qu’il était difficile de transformer en tendance les préférences du moment de quelques auteurs. La publication de Reine de Mémoire ne signalait pas qu’une vague d’uchronies se préparaient à envahir les tablettes des librairies.

Mais maintenant? Je ne pense pas que je peux seul répondre à la question. Certes, les impératifs commerciaux ne sont pas les même dans le marché du livre québécois qu’ils peuvent l’être, par exemple, dans celui étatsunien. Les auteurs d’ici ont une plus grande marge de manœuvre d’écrire ce qu’ils veulent, plutôt que ce qu’on leur demande. Mais le lecteur de SFFQ peut-il déceler des tendances, des courants qui varient d’une année à l’autre? Cela me semble un sujet de discussion fort intéressant.