C’est Catherine Leroux, pour son roman L’Avenir (Éditions Alto), qui remporte le
prix Jacques-Brossard 2021 remis à l’auteur ou l’autrice pour la meilleure production dans les genres de l’imaginaire au cours de l’année précédente. La lauréate, qui reçoit une bourse de 3 000 $ grâce à un legs de la Fiducie Jacques Brossard, a été préférée aux deux autres finalistes, Mireille Gagné pour Le Lièvre d’Amérique (La Peuplade) et Martine Desjardins pour Méduse (Alto).
Née en 1979, Catherine Leroux en est à son quatrième livre depuis 2011. Au sujet de L’Avenir, le jury a été séduit par le parfait équilibre entre l’écriture et l’histoire, la pertinence des questions soulevées par le roman dans un monde urbain en décrépitude sans offrir des réponses toutes faites, la richesse des métaphores, la création d’une langue vernaculaire savoureuse et limpide, mélange de français et d’anglais, et l’habile dosage d’écoanxiété et d’espoir. Les deux pôles entre lesquels le roman oscille sont incarnés par deux communautés, celle des adultes qui tentent de reconstruire le quotidien avec leurs modestes moyens et celle des enfants qui ont choisi de vivre en autarcie dans la nature, en marge des adultes en qui ils ont perdu confiance.
La première partie du roman se présente sous la forme d’une uchronie faisant de Fort Détroit une enclave francophone au milieu d’une Amérique du Nord anglophone. Les adultes tentent, à l’échelle locale, de survivre sur les décombres du passé de la ville en s’entraidant et en s’inspirant de l’étonnante résilience de la nature. La deuxième partie donne à voir, dans le registre du réalisme magique soutenu par des images poétiques touchantes, la fascinante capacité des enfants à transcender la violence de leur environnement grâce à leur imaginaire foisonnant et à un appétit féroce pour la vie, n’hésitant pas, dans leur allégeance à la nature, à détruire ce qui la pollue. La réussite de Catherine Leroux repose sur la réunion émouvante de ces deux univers contrastés, dont les représentants possèdent chacun leur langage propre, afin d’amorcer un dialogue permettant d’envisager un avenir viable sur la base de l’expérience et du respect des choix de chaque clan.
Le jury de pairs était composé des cinq membres suivants : Christiane Lahaie, professeure de littérature à l’Université de Sherbrooke et écrivaine ; Héloïse Côté, chargée d’enseignement à la faculté des sciences de l’éducation à l’Université Laval et écrivaine ; Myriam Guimond, scénariste et cinéaste; David Dorais, professeur de littérature au cégep Sorel-Tracy et écrivain ; Éric Gauthier, écrivain et conteur, lauréat du prix Jacques-Brossard 2020. Les jurés ont évalué la production de 43 auteurs et autrices répartie en 13 romans, 40 nouvelles et deux recueils. Le choix des trois finalistes souligne la qualité remarquable de la contribution des femmes aux littératures de l’imaginaire en 2020.