Éditorial: De l’importance des clubs-écoles

Cela va peut-être vous surprendre, mais les écrivains ne poussent pas dans les arbres.

Même pour ceux possédant un talent naturel pour l’écriture, affiner sa plume peut être un processus long, qui demande de faire ses classes. Il faut écrire beaucoup, mais surtout il faut accepter que pendant longtemps notre production ne sera pas de calibre professionnel. Au mieux, elle contiendra des failles qui devront être éliminées avec l’expérience. Au pire… ne parlons pas du pire.

Seul dans son coin, il peut être difficile de reconnaître ses faiblesses d’écriture. L’encadrement nécessaire peut provenir de diverses sources (les ateliers d’écriture en sont une), mais ultimement l’auteur débutant aura besoin d’un marché où ses textes pourront être publiés. Il n’est pas encore prêt pour les publications professionnelles, mais une direction littéraire rigoureuse lui permettra d’atteindre plus rapidement ce palier. Il a besoin d’un club-école.

L’existence de fanzines (publications amateurs ou semi-professionnelles réalisées avec peu de moyens mais beaucoup de passion) est nécessaire à un écosystème littéraire en santé. Ils sont nombreux à s’être succédé dans les quarante dernières années. La plupart ont cessé de publier après une carrière parfois courte, parfois longue. D’autres ont abandonné le statut de fanzine: fondé en 1974, Requiem a changé de nom, s’est professionnalisé et est devenu la revue Solaris d’aujourd’hui. Brins d’éternité suit ces années-ci une courbe similaire: même si ses pages sont encore ouvertes aux auteurs débutants, ses standards ont monté; il ne s’agit plus d’un fanzine où faire ses premières armes.

Ce qui nous amène au nœud du problème: il y a à l’heure actuelle une absence presque totale de fanzines en SFFQ. Il manque cet espace où les nouveaux auteurs pourraient évoluer. Clair/obscur, voué à l’horreur, ne peut jouer ce rôle pour l’ensemble des littératures de l’imaginaire.

On peut espérer que ce ressac n’est que temporaire, que de nouveaux fanzines verront prochainement le jour. Ceux-ci n’auraient pas besoin d’être sous format papier: une publication électronique ferait très bien l’affaire, en autant qu’une volonté de développement littéraire soit présente.

Les revues et éditeurs professionnels ont besoin de leurs clubs-écoles. Il est grandement temps que ceux-ci renaissent.

Un commentaire sur “Éditorial: De l’importance des clubs-écoles

  1. Pierre-Alexandre

    Je suis tellement, mais tellement d’accord!

    Bon, on va se l’avouer, je suis justement dans la situation où j’aurais besoin d’un club école pour me faire les dents. J’ai essuyé quelques refus de la part de Solaris et Brins d’éternité, et c’est correct! J’ai publié un texte dans Clair/Obscur et j’en suis super content aussi! Mais si je veux publier autre chose que de l’horreur, au niveau d’écriture où je suis rendu, ça me prend une marche plus basse que Brins d’éternité, mais plus haute qu’un blogue où je mettrais moi-même mes textes en ligne disons!

    Le problème des fanzines est, à mon avis, double : d’une part, s’il n’est pas assez professionnel, ça ne donne pas grand chose d’y publier, parce qu’ils vont accepter n’importe quoi ou ils ne seront pas en mesure de m’aider à rendre mes textes meilleurs. De l’autre côté, s’ils sont assez professionnels, les chances sont bonnes pour qu’ils décident, avec le temps, de passer du statut de fanzine à celui de revue plus professionnelle (comme c’est arrivé avec Brins). Et cette volonté est louable et légitime. Mais le problème reste entier, et je pense que le noeud dudit problème est de trouver l’équilibre entre professionnalisme et accessibilité aux jeunes auteurs ayant besoin de direction littéraire.

    Mais je pense effectivement qu’Horizons Imaginaire pourrait, éventuellement, être le chaînon manquant, puisque le projet pourrait changer de mains régulièrement, lorsque les étudiants qui y travaillent terminent leur scolarité. De cette manière, une telle revue permettrait également à ces jeunes de se faire les dents dans le domaine de l’édition, de la direction littéraire et de la révision linguistique, ce qui s’avèrerait une expérience inestimable pour eux.

    Croisons les doigts! 😉

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