Éditorial: Un lecteur averti en vaut au moins un

Nous sommes habitués que les films – et plus récemment les séries télévisées – soient classés selon le public auquel ils sont destinés. Le « G » d’un film pour tout public deviendra un « 13 ans ou plus » si on y retrouve un langage inapproprié pour les enfants ou des scènes de violence.

La question que je pose aujourd’hui: la littérature devrait-elle faire de même? Le quatrième de couverture d’un roman devrait-elle avertir le lecteur des scènes de violence ou d’érotisme qu’il contient?

La question est discutée sérieusement chez nos voisins américains. Chez les magazines littéraires électroniques anglo-saxons, il est devenu monnaie courante d’inclure un avertissement lorsqu’un texte contient des passages pouvant déranger certains lecteurs.

Comme lecteur, cette idée me déplaît. L’acte même de lire implique une certaine maturité. L’exigence de classer les œuvres littéraires en catégories rigides (et possiblement contestables) me semble aller à l’encontre de cette maturité présumée. De plus, je doute qu’exposer un lecteur adolescent à une œuvre destinée à un public adulte lui causerait véritablement un préjudice. Si le livre s’avère réellement ne pas lui être destiné… et bien qu’il le ferme, et le dommage s’en finira aussitôt (les livres qui rendent fous, chers à Lovecraft, sont heureusement peu nombreux dans les bibliothèques publiques).

Qu’entend faire la République du Centaure à ce sujet? Nous n’avons pas encore eu à établir de politique en la matière, les textes publiés jusqu’à maintenant ne comportant aucune scène graphique ou langage excessif. Nous n’avons cependant pas fermé la porte à en publier à l’avenir. La transgression d’interdits est une pratique établie dans le domaine de la littérature de l’imaginaire, et lorsque venant d’un plume experte cela peut mener à des récits de grande qualité.

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Un commentaire sur “Éditorial: Un lecteur averti en vaut au moins un

  1. Hugues Morin

    J’avoue que ma première réaction est l’étonnement. Le milieu littéraire (général) a toujours bien fonctionné avec ses propres balises (éditeurs, 4e de couverture, libraires informés, critiques publiques, etc.) sans éprouver la nécessité de cotes d’avertissements.
    Il faut comprendre que ce cotes, au cinéma d’abord puis à la télé, sont apparues parce que ces médias sont par définition plus graphiques que la littérature. Certes, des livres peuvent être graphiques et contenir des descriptions assez évocatrices et dérangeantes (voir Alyss ou Le Vide de Patrick Senécal comme deux bons exemples), mais dans tous les cas, il s’agit de phrases, et non d’images crues qui s’imprègnent directement dans le cerveau via un aperçu même éphémère. C’est au lecteur de se faire ses propres images avec ces mots, et en ce sens, je vois mal comment un système de cote pourrait être établi.
    Même au cinéma, ce système est souvent critiqué par son aspect subjectif, alors imaginez en littérature? À l’écran (petit ou grand), les cotes sont déterminées selon l’occurrence de mots ou de parties du corps ou d’actes violents (sang ou non, mort ou non, par exemple). Comment appliquer ça en littérature? Quels seraient alors les critères: les mots utilisés, le nombre de fois? Quel mots? Baiser (comment distinguer un simple baiser sur la bouche?) Cul? (Impossible, puisque des phrases comme «tomber sur le cul» ou «botter le cul» additionneraient un mot sensible), Sein? (que faire des livres documentaires ou scientifique?)
    Bref, selon moi, c’est quand même plus facile de distinguer une scène de film ou de télé qui montre un acte violent ou sexuel plus ou moins explicite que de le distinguer en littérature, mais je ne suis évidemment pas un expert de la question.

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